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Au maître, au confrère, à l'ami : florilège d'envois à Paul Bourget

Henry Bernstein (1873-1953)

Henry Bernstein, auteur dramatique à succès, a été relégué après sa mort, comme Bourget, au purgatoire des lettres françaises. Cible continue des antisémites, sa caricature figure dans l’exposition vichyste sur Le Juif et la France présentée du 5 septembre 1941 au 5 janvier 1942. Trente ans auparavant, en 1912, il se battait en duel avec Léon Daudet, conséquence de la campagne de dénigrement menée par les Camelots du roi pour le retrait de sa pièce Après moi de l’affiche de la Comédie française. Proche de l’Action française, mais refusant tout antisémitisme, Bourget ne prit aucune part à ces menées. Bourget et Bernstein écrivirent des drames psychologiques, joués dans les théâtres de boulevard. Si « Henry Bernstein est le dramaturge des passions bourgeoises », Bourget est celui des amours aristocratiques. Cependant, Bernstein peut être considéré, à l’instar de Bourget, comme un auteur engagé, avec Israël (1911) ou L’Assaut (1912), même s’il affirma n’avoir pas voulu écrire des pièces politiques. Contrairement à Bernstein, Bourget se lança tardivement dans le théâtre. Il fut d’ailleurs épaulé par des dramaturges (André Cury pour Un divorce en 1904) pour les pièces tirées de ses romans, puis écrivit seul Le Tribun (1910) et La Barricade (1911). Bourget et Bernstein purent se croiser en coulisses sur les plateaux des scènes du Vaudeville et du théâtre de la Renaissance. Leurs œuvres furent jouées par les mêmes troupes, comme la tournée Barret. Les grands acteurs et actrices de la Belle Époque interprétèrent leurs personnages principaux, comme Julia Bartet (1854-1941), qui lut des vers de Bourget, et interpréta Irène dans Après moi de Bernstein. L’Ère nouvelle du 7 juin 1925 rapporte aussi dans un même article les différends que les deux auteurs eurent avec l’acteur Lucien Guitry en 1912, Bourget lui refusant la reprise de L’Émigré et Bernstein un rôle-titre. Ces deux écrivains mondains, et à la mode, furent aussi les modèles de deux personnages de Colette, Bernstein inspirant le personnage de l’auteur dramatique Farou, dans La Seconde (1929) et Bourget, sans doute, celui du romancier mondain Léon Payet, dans Claudine s’en va (1903).

Pour en savoir plus :
FINGHER, Michèle, « Henry Bernstein et l’identité juive », Double jeu, n° 14, 2017, p. 73-83.




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